lundi 12 janvier 2009

Histoire et réflexions autour du Taux de service

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Il est parfois bon de revenir sur l’état de l’art de certains de nos indicateurs pour savoir de quoi on parle et approfondir la réflexion…
Voici donc un bref aperçu de l’histoire du taux de service, un des indicateurs les plus utilisés de la Supply Chain :

Helmut Schneider (1981) est un des premiers auteurs à avoir fait une revue des systèmes de mesure du taux de service et à avoir mis en perspective les coûts imputables aux ruptures de stocks.

En 1992 Lagodimos définis plus en détail la notion de taux de service en introduisant trois nouvelles mesures qui sont :
- La probabilité de rencontrer une rupture sur un produit sur une période donnée.
- Le « fill rate » qui représente la fraction de la commande qui est livrée au client avec le stock disponible.
- Le « modified fill rate » dont la formule est 1-(« La moyenne des ruptures avant approvisionnement » / « La moyenne de la demande sur une période donnée »)

En 1998 les travaux de Silver précisent la notion de « fill rate ». Même si l’indicateur est communément appelé « fill rate » de nouveaux systèmes de mesure apparaissent comme le « volume fill rate » (VFR), l’ « order fill rate » (OFR) et le « line fill rate » (LFR) qui correspondent à la fraction de ce qui est livré par rapport à ce qui a été commandé par le client. Les trois indicateurs se basent respectivement sur le volume (en quantité ou en montant), sur les commandes complètes ou sur les lignes de commande complètes.

Par la suite ces indicateurs se sont complexifiés en intégrant la notion de temps. Ainsi est apparu l’indicateur On-Time Delivery (OTD) qui permet de d’obtenir la fraction de la commande qui est livrée au client dans les temps. C’est indicateur est également intéressant dans le sens ou il est représentatif de la vision du client et qu’il peut révéler des problématiques autres que celle de la disponibilité du stock.


Cette histoire du taux de service m’inspire 3 réflexions :
1 - Un design dominant qui masque une certaine complexité de calcul de l’indicateur :
En effet, nous pensons tous parler de la même chose lorsque nous évoquons l’indicateur taux de service. Mais en fait, derrière la simplicité déconcertante de la définition de l’indicateur (fraction de la commande qui est livrée) se cache une vaste complexité. Voici quelques questions que nous pouvons être amenés à nous poser :
- Quel est le périmètre des commandes observées sur la période ? Les commandes devant être livrées dans la période ? Les commandes passées dans la période ? Les commandes dont la première livraison a été réalisée sur la période ? Les commandes dont la livraison est totalement réalisée ?
- Qu’est-ce qui constitue le dénominateur (ce qui est commandé) ? Les lignes commandées au départ du client ? Les lignes arrivées chez l’approvisionneur (Lignes commandées d’où sont extraites les lignes rejetées par le système informatique) ? Les lignes enregistrées par l’opérateur de saisie (qui peut écarter de lui-même certaines lignes qui posent problème) ?
- Qu’est-ce qui constitue le numérateur (ce qui est livré) ? Ce qui est partiellement livré ? Ce qui est totalement livré ?
- Quelle date est prise en compte dans l’indicateur OTD ? la date d’expédition ?, la date de livraison théorique ? la date de livraison réelle ?

2 – Le taux de service est un indicateur interne de performance avant d’être un indicateur de qualité.
En effet le taux de service fournis avant tout l’information d’un manque à gagner subit de manière directe par l’entreprise mais s’intéresse peu au ressenti du client. Par exemple si le client ne met pas à jour son fichier article, celui-ci passera des commandes sur des articles fermés. Ces lignes de commandes seront « rejetées » dans le système d’information, si bien que la ligne non livrée n’apparaîtra pas dans le taux de service. Sur ce type de problème : du côté de l’entreprise on perd une vente sur le nouveau produit (il est à noter que certaines entreprises mettent en place des automatismes de substitution mais cela peut poser problème chez le client lors de la réception du produit inconnu) et du côté du client on subit une rupture de stock.
Par ailleurs si l’indicateur OTD présente une bonne alternative comme suivi de la qualité du service client, celui-ci n’est que très peu utilisé car les logisticiens privilégient ce qui est livré sur ce qui est livré à temps.

3 – Les indicateurs de performance de la supply chain ne doivent pas s’arrêter aux frontières de l’entreprise :
Trop souvent (en dehors de quelques mastodontes de la GSA, sur certaines familles de produits à forte rotation) les acteurs de la grande distribution se cantonnent à mesurer leur propre taux de service. Mais la supply chain est un processus transversal qui ne s’arrête pas aux frontières de l’entreprise. Il est donc indispensable que tous les acteurs (industriels et distributeurs) prennent enfin conscience de la nécessité de travaillé ensemble sur un taux de service commun et unique : celui du linéaire du magasin. Cela s’appel le CPFR (Collaborative Planning, Forecasting and Replenishment), c’est très répandu au USA. Arrivé en France dans les années 2000… Il faudra, à mon avis, encore longtemps avant que ce processus soit généralisé en Europe…

Alors pour finir, j’adresserai deux conseils à mes amis de la logistique :
- Si vous souhaitez entamer un projet LSS sur le taux de service : pensez à la vision de votre client (voir à celle du client de votre client) plutôt que de récupérer tel quel le taux de service utilisé dans votre entreprise.
- Et à la phase amélioration : penchez vous sur le processus CPFR, à coup sûr il vous inspira des solutions auxquelles vous n’avez jamais pensé.

PS : Désolé pour le manque d’illustrations de ce post ! ;-)

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